Friday, February 16, 2007

Royal toujours dans les turbulences

Après les critiques sur la campagne participative et malgré le discours-programme de Villepinte, les socialistes ne parviennent pas à rebondir.

Y a ma campagne qu'a des ratés. Et mon adversaire qui a «la banane». C'est, un peu crûment, la photographie de la campagne présidentielle à J ­ 66. Alors qu'elle avait dimanche globalement réussi son très attendu examen de passage de Villepinte, Ségolène Royal se retrouve trois jours après à nouveau en difficultés. Certes, la candidate du PS continue d'afficher une sérénité à toute épreuve. Et se dit convaincue de pouvoir battre Nicolas Sarkozy au mois de mai, malgré des sondages qui continuent de lui être défavorables. «Il faut huit jours pour que mon discours s'installe dans l'opinion» et produise des effets dans les sondages, prétend-elle. Les prochaines enquêtes d'opinion le diront.

Bug. Mais, à trois jours de son passage en prime sur TF1 lors de l'émission J'ai une question à vous poser, Ségolène Royal, de fait, se retrouve à nouveau sur la défensive (lire page suivante). Elle reste empêtrée dans des dysfonctionnements de campagne et des querelles internes au Parti socialiste qui ont peu à voir avec le débat de fond qu'elle souhaite tenir avec le candidat de l'UMP. Encore moins avec le message qu'elle a voulu délivrer dimanche aux Français.

Le dernier bug de campagne est évidemment la démission de son poste de secrétaire national du PS chargé de l'économie d'Eric Besson (lire l'encadré). En déplacement hier, Ségolène Royal a minimisé l'événement (lire page ci-contre). Et François Hollande, en nommant illico deux remplaçants (Michel Sapin et Didier Migaud), a voulu tourner au plus vite la page. «La démission d'Eric Besson n'a rien à voir avec le chiffrage du pacte présidentiel, a-t-il confié à Libération. C'est un problème personnel, qui ne mérite pas d'autre commentaire et qui n'a pas de signification politique. Eric Besson faisait un travail très constructif, Michel Sapin, qui le remplace, fera de même. Ne perdons pas de temps. Notre responsabilité est collective. Dans cette campagne, je veux que la clarté soit le mot d'ordre.» Autrement dit, il n'y a pas de temps à perdre pour remettre la campagne sur les rails, en s'adressant aux Français, en lançant la «confrontation» avec la droite. Et en renvoyant Nicolas Sarkozy à son bilan.

Pour y parvenir, les socialistes se doivent urgemment de régler des dysfonctionnements de campagne plus révélateurs que Ségolène Royal ne veut bien l'admettre. Exemple: mercredi, elle a complètement raté un déplacement a priori sans danger au-devant des sportifs ( Libération d'hier). Un membre du PS présent se désolait hier «de l'absence de préparation» du rendez-vous. «J'étais furieux qu'une journée qui devait être une fête tourne au fiasco», ajoutait-il, avant de redouter que l' «improvisation soit la marque de fabrique» de la candidate.
La direction du PS argumente à juste titre qu'une campagne trop normée, à la Jospin en 2002, a prouvé son inefficacité. Mais entre l'enfermement dans une stratégie trop rigide et la confusion quotidienne, il y a une marge.

Intendance. Ségolène Royal est également trop avertie de l'importance de la communication politique pour ne pas s'inquiéter de la grogne qui monte dans la caravane des journalistes, photographes et cameramen. Son staff a d'ailleurs tenté mercredi de calmer la troupe des «suiveurs», pas disposés à se laisser enfermer dans les «désirs» de com de la candidate.
Tous ces soucis d'intendance relèveraient de l'anecdote si la candidate Ségolène Royal parvenait à imposer à son adversaire une confrontation sur le fond, sur ses thématiques, sur son projet. D'ici à ce week-end, elle devrait délivrer le fameux «chiffrage» de son projet. Et dénoncer les incohérences de celui de Nicolas Sarkozy.

Lundi sur TF1, elle cherchera sans doute à conforter son image de candidate de la proximité au fait des soucis quotidiens des Français. Puis mardi, à Rennes (Ille-et-Vilaine), elle prononcera un discours sur la «valeur travail» que lui dispute Nicolas Sarkozy. Une valeur normalement sûre. Mais il y a encore du travail.

Par Paul QUINIO